Des Apaches

Écrit et Réalisé par Nassim Amaouche. Avec Nassim Amaouche, Laetitia Casta, Djemel Barek, André Dussollier, Alexis Clergeon, Kamel Labroudi. France. 97 minutes. Sortie française le 22 Juillet 2015.

Il y a des cinéastes qui adorent utiliser la musique dans la progression de leur récit. Comme si la bande originale peut servir de moyen de narration, voire de rythme. Mais le plus souvent, la musique est un argument d’ambiance. Comme pour DES APACHES, Nassim Amaouche calque l’ambiance de certaines situations sur des mélodies. Cela crée la dynamique d’une action, et donne le ton selon les attitudes des acteurs. En agissant ainsi, le film annonce (de manière suggestive) les événements à venir. Un film assez prévisible, dictant aux personnages ce qui les attendent.

Le film fonctionne sur un seul sujet, divisé en deux parties. Il y a la quête intime, puis la quête identitaire. Il faut notamment préciser que ces quêtes personnelles sont mises en place chez deux personnages. Le protagoniste, mais aussi le jeune garçon. Ce garçon est un élément narratif causant un second point de vue. Le film débute alors avec ces deux points de vue, mais le récit centré sur le jeune garçon n’a pas réellement d’utilité, et comble le long-métrage en durée.

Ceci dit, le film propose une exploration du soi. Tout d’abord, il y a une quête intime. A travers la romance du récit, le protagoniste se découvrira dans une relation. Des plans d’une grande tendresse, où le peu de mots suffit aux attitudes pour exprimer les sentiments. Il suffit d’un léger rire, d’un banc où s’allonger, de s’asseoir en haut d’un immeuble, … pour montrer ses émotions. Il s’agit de moments intimes, permettant de construire les personnages dans l’avenir. A côté de cela, il y a le regard sur les Kabyles de Barbès. Dans sa quête identitaire, le protagoniste doit revenir au sein de sa communauté. Celle-ci est décrite avec tellement de précisions et d’ardeur, que l’approche est quasi documentaire. Le découpage est radical, souvent serré et fixe, dans une photographie en permanence en accord avec l’enjeu des scènes (froideur, noirceur, tendresse, déception, …).

Pourtant, dans ce montage, la mise en scène subit un même élan. Celui où le cinéaste et le protagoniste (incarné par le réalisateur même) se confondent. Premièrement, la mise en scène subit une confusion. Comme le dit le protagoniste à un moment, il évolue dans la solitude (et que cela est venu naturellement) sauf que la communauté le rattrape. Il y a un constant va et vient entre ces deux états, entre l’individuel (compensé par les moments intimes et la romance) et la communauté (le retour dans la famille). Sans jamais les faire se côtoyer, ce qui est dommage, les deux états ne sont jamais remis en question. Et ni la solitude ni la communauté n’a l’air d’influer sur le comportement du protagoniste, tant il reste passif.

C’est aussi là le manque d’inspiration dans le regard sur la romance et la communauté. Quand on mentionne le point de vue du protagoniste, il est souvent en marge des situations. Il n’est jamais réellement au centre des événements, il est neutre et observe. Le film fonctionne dans cette idée : l’observation, mais sans vraiment s’impliquer. C’est là tout le problème du long-métrage, où le protagoniste n’est pas un élément moteur des états (la romance arrive par hasard et progresse de manière académique / il est spectateur des règles et agissements des Kabyles). Loin d’être désintéressé, ce personnage est presque un élément perturbateur. Mais pas abouti, puisque la musique (qui sert d’ambiance) et la convenance du découpage forment une contemplation, où la non implication interdit de créer une direction pour le récit.

Tout de même, Nassim Amaouche veut apporter de l’émotion et de la sincérité. Grâce à la romance, qui intervient comme des temps morts aux séquences de communauté, la délicatesse s’empare du récit. Toutes les émotions ressenties par le protagoniste, et par le personnage de Laetitia Casta, sont le manque arraché à la famille Kabyle. Comme un complément qui vient ouvrir les portes d’une autre possibilité de contact privé, de relation charnelle. Ce que le protagoniste n’a pas saisi dans la communauté, il tente de le saisir dans la romance. D’où la subtilité que la romance et la communauté ne se rencontrent jamais. C’est avec aussi une grande sincérité que le long-métrage progresse, dans une voie très explicative et linéaire. Notamment par l’utilisation de la voix-off, apportant un élément neutre supplémentaire. Quand la voix-off apparait, le ton du film devient plus bancal. Tel un descriptif des sensations, mais surtout une description des espaces pour introduire vers où se dirige le protagoniste. Quand la voix-off annonce le présent, et que la musique annonce le futur, le film se contente d’observer.

2.5 / 5