Steven Spielberg a le don de nous faire aller voir ses films. Même quand on n’en a pas forcément envie. Rendez-vous compte avec Le Pont des Espions : dans les années 1960, un avocat américain spécialisé dans les assurances va se retrouver avec la défense d’un espion russe sur les bras. Ça vous motive ? Pas vraiment. On est loin de James Bond, ou même de Law & Order. Et pourtant, une fois encore, Spielberg réussit son coup, sans vraiment prendre de risque. « Inspiré de faits réels ».
Évidemment, le film n’est pas un produit d’amateurs. Outre la réalisation signée par une valeur sûre, c’est un Tom Hanks cabot qui campe le rôle principal (l’avocat James Donovan), une interprétation dans laquelle il excelle. Mais on ne pourrait pas passer sous silence la performance tout en retenue de Mark Rylance (l’espion russe Rudolf Abel) qui attire l’attention à lui, un contraste saisissant entre l’empathie qu’il suscite chez le spectateur, et la haine qu’il déclencha à l’époque de la part du peuple américain. Une haine qui se propagera évidemment à son avocat, dans un climat « seul contre tous » assez classique.
Ce qui est moins classique en revanche, c’est le rythme. Malgré 2h20 de film, Le Pont des Espions va vite. On ne s’attarde pas sur des scènes d’action (il y a un avion américain qui se fait descendre quand il survole le territoire russe, c’est tellement limpide que l’on en voit très peu d’éléments, à l’inverse de sa préparation), et c’est bien la narration qui est à l’honneur. Intensément travaillée, elle offre des situations cocasses et parfois des dialogues vraiment savoureux. Le film nous ramène également à l’époque de la RDA (l’Allemagne de l’est, créée par les communistes alliés de l’URSS) et de la séparation de Berlin en deux parties avec la construction du célèbre mur, nous exposant des enjeux assez vite oubliés de l’Histoire (les manoeuvres de la RDA pour être reconnue sur le plan international).
Au final, Spielberg nous a déterré des archives de la belle matière à scénario, et l’on s’en voudrait presque d’avoir douté de lui. Il demeure toujours un maître pour des films historiques, et derrière l’anecdote on trouve dans Le Pont des Espions un moment idéal de cinéma. C’est presque trop facile.
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