The dead don’t die

Après les vampires de ONLY LOVERS LEFT ALIVE qui apportait une très poétique et mélancolique réflexion sur la jeunesse et la vieillesse, Jim Jarmusch s’attaque ici aux morts-vivants. THE DEAD DON’T DIE attire surtout par son casting, digne de créer un défilé à lui seul sur un tapis rouge. Mais que cherche le cinéaste à travers les morts-vivants ? Et bien, il ne faut pas chercher bien loin. Jim Jarmusch s’est longtemps présenté comme étant en marge de la société, vivant dans un monde qu’il ne comprend plus. Ainsi, quoi de mieux que de transformer tous les consommateurs d’une société moderne en zombies ? Et de faire reposer la dimension intellectuelle sur un personnage ermite, tout en contaminant chaque autre personnage par l’humour et l’absurdité. Mais voilà le plus gros soucis de ce film : Jim Jarmusch se moque de la société actuelle, mais ne propose rien d’autre que du sarcasme. D’autant plus que son sarcasme est assez méprisant, car son discours n’a d’autre finalité que de dresser un regard dégoûté.

THE DEAD DON’T DIE est alors très lourd, car il se repose sur la comédie tout au long de ses 105 minutes. Jusqu’à même créer une apparition inattendue, mais qui ne sert seulement qu’à accentuer inutilement le côté absurde, ou au mieux à faire sourire quelques secondes. Le film se résume alors à de la comédie potache, à une absurdité répétitive et totalement creuse. Parce que, dès le début, le propos du cinéaste est facile à comprendre. Ensuite, il n’y a plus rien à recevoir, le film se contente de dérouler un schéma monotone. Très loin de ré-inventer le film de zombies, ou même le genre fantastique en lui-même, THE DEAD DON’T DIE utilise constamment le réchauffé au travers de références très (très) surlignées. On pense évidemment aux films de George Romero, tellement plus inspirés et intelligents que cela. On a beaucoup de mal à trouver le regard de Jim Jarmusch dans ce film, sans pour autant demander qu’il ressemble à ses films précédents. Pour nous faire croire à la mélancolie et à la poésie, de longs plans frontaux sur les comédien-ne-s les laissent jouer, tout en grossissant les traits de leur léthargie et frigidité. Tout est complètement épuré, pour préférer le prévisible au travail esthétique.

Ce qu’il faut varier, c’est le traitement d’un genre/thème/regard, ce n’est pas varier le style. Il s’agit de comprendre comment convertir le film de zombies avec le style du cinéaste, et non de convertir le style du cinéaste par le biais du film de zombies. C’est là tout le soucis de THE DEAD DON’T DIE : c’est un film de zombies avec des récurrences du style Jarmusch, diluées fadement dans le genre. Le film fait durer ses plans pour tenter d’y trouver de la contemplation, il crée une sorte de nonchalance pour tromper l’idée de mélancolie, il croit qu’un petit village de « l’Amérique profonde » provoque automatiquement la poésie dans son architecture et ses nombreux espaces verts. Sauf que le côté dandy hautain prend le dessus, et l’esthétique du film n’est plus qu’un enrobage d’un malaise transformé en humour, pour que le propos puisse passer tranquillement. Exactement comme son discours écologique, très expéditif, n’étant plus qu’un récit en arrière-plan pour expliquer ceci et cela. Ou alors comme le discours méta sur le cinéma, qui se résume en deux blagues, pour tenter d’amuser la galerie en voulant gagner en crédibilité dans l’absurdité. THE DEAD DON’T DIE est donc un exercice de plus sur la maîtrise et le style, mais bien trop peu inspiré et trop mécanique. Heureusement que l’on rit, un temps.


The Dead Don’t Die
Écrit et Réalisé par Jim Jarmusch
Avec Bill Murray, Adam Driver, Chloe Sevigny, Tilda Swinton, Tom Waits, Steve Buscemi, Danny Glover, Caleb Landry Jones, Selena Gomez, Austin Butler, Iggy Pop, Carol Kane
États-Unis, Suède
1h43
Mai 2019

2 / 5
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