C’est tellement facile de faire des jeux de mots avec Moby, que je n’en ferai aucun. Le lutin électrisé revient avec son album Hotel, que je vais considérer souverainement comme le troisième, bien que ça soit totalement faux. Je n’ai jamais eu plus de sympathie que cela pour le personnage Moby, mais il faut reconnaître que son premier album Play avait secoué quelques tympans. En reconnaissant les qualités de cet album, il faut aussi en reconnaître la date de péremption très avancée, qui est due aux ravages de la publicité pour laquelle Moby a vendu son âme.
Ensuite il y a eu 18. Un album que je n’ai jamais eu, que je n’ai même jamais écouté, et dont je serai bien incapable de vous citer un morceau à part celui de we are all made of stars qui n’avait rien de transcendant.
Néanmoins, Moby à mon avis, c’est loin d’être un con. Et il a bien vu que 18, c’etait pas un Play-bis, encore moins un plébiscite (je la note celle-là , elle est terrible). Et du coup il a dû mûrement réfléchir son Hotel, en prenant bien soin d’y mettre ce qui marche en ce moment côté musical. Nous allons voir ça…
Hotel intro : moins de deux minutes d’intro pour retrouver du Moby classique, mais c’est assez sympathique, calme, avec des sons qui se calent peu à peu pour enrichir le morceau (la marque de fabrique Mobyienne). J’y trouverai presque un sample d’une musique de Twin Peaks, mais je ne suis pas assez calé.
Raining again : Moby chante, bon ça on le savait. Il n’a pas une voix exceptionnelle, mais il fait des efforts (quand il évite de parler, car c’est surtout ça qui est chiant). Il s’agit d’un morceau de pop maquillé d’électro, mais c’est bel et bien de la pop. Moby a senti le filon, il s’y est engouffré, et voilà. Sachant qu’à la base le type a un très bon sens du rythme et de la mélodie, il réussit de bonnes choses.
Beautiful : pareil ; Moby a juste rajouté de la guitare électrique, mais la construction du morceau est identique au précédent. Cela reste de la pop.
Lift me up : je crois qu’il s’agit du premier single non ? Bien joué, car il est d’un niveau supérieur aux morceaux précédents. Vous pouvez donc apprécier le sens du rythme (toujours, j’insiste) du bonhomme. Avec un refrain entraînant qui peut faire bouger quelques fessiers. Pour le reste, j’espère que tout le monde en conviendra, Moby n’a pas innové ; et surtout pas par rapport à du Moby précédent (on retrouve le choeur, cette voix black qui braille en fond ; et la superposition de samples). Bon, une chanson contre l’Administration Bush, ça ne mange pas de pain
, comme on dit dans le Tiers-Monde.
Where you end : ah la vache il est habile ! Non franchement, faut le reconnaître. S’il n’a vraiment pas inventé la poudre, il sait faire de sacrés pétards. Il n’y absolument rien de neuf dans ce morceau non plus, mais le résultat est efficace. Il ratisse large niveau public en plus. Un titre un peu plus maquillé d’électro que les autres, mais sans pour autant laisser de côté la pop classique (le piano…)
Temptation : quel petit escroc. C’est bien le Temptation de New Order qu’il y a là-dedans ! Si si cherchez bien… Ce n’est pas Moby qui chante cette fois, mais Laura Brown. Mais le rythme est ralenti au possible, ça en devient une sorte de love-song où tu t’endors sur l’épaule de la personne avec laquelle tu tournes en rond depuis deux heures sur un slow…
Spiders : niah, voilà un morceau pas original, et en plus, pas terrible non plus. C’est bien fait pour lui ! Petits couplets, puis refrain qui monte, bla bla bla. En plus les paroles sont niaises. C’est du Lift me up en moins bien. Zap !
Dreams about me : voix féminine, puis Moby vient l’accompagner, c’est mignon. C’est de la pop bas de gamme encore. Et ça ne m’inspire pas.
Very : bah alors y’a une dame qui chante comme une petite diva sur un morceau d’électro rapide. Mélange des genres quoi. J’ai déjà vu ça dans Le 5e Elément…
I like it : l’est bizarre celui-là ; y’a plein d’électro douce, une voix féminine et masculine (Moby ?), c’est tout lent, c’est… ouais, une sorte de dub-électro-lent. J’avoue que je suis perdu. Enfin bref, c’est pas top.
Love should : piano piano, petite voix de Moby toute love, c’est une chanson love au piano. Bah voilà ; sinon j’ai eu des sortes de parasites tout au long de la chanson, revenant régulièrement. J’ignore si c’est fait exprès ou si mon exemplaire a un défaut, mais c’est moyen.
Slipping away : alors cette fois-ci rien à voir avec le Slipping Away de Nine Inch Nails. Ici Moby montre qu’il a totalement plongé dans la pop facile : piano guitare rythme, tout y est, jusqu’au refrain où sa voix est doublée et les instruments montent de volume (pour bien te montrer que c’est le refrain, au cas où tu ne l’aurais pas remarqué). Que voulez-vous, il est impossible de dire que le morceau est mauvais quand rien n’est à reprocher. J’en suis presque frustré, tellement au niveau de l’inventivité je passe de Grand National à Moby, du tout au rien. Allez, pour le fun, on va dire que la fin est répétitive.
Forever : ouh là on tombe carrément dans la ballade que le doux Moby vient te sussurer à l’oreille sur le rebord de ta couche, ma belle, pendant que tu somnoles. Et vas-y que je t’aime pour toujours, qu’on est bien tous les deux, qu’on va acheter un chien et planter des myosotis dans le jardin. « Oh, we could feel this way, forever…«
Homeward angel : le morceau final, le morceau le plus long (5’37″ ; n’oubliez pas que Moby est formatté pour le commercial), est une sorte d’instrumental (comme le Hotel intro) tout calme. Oh ça y est, je revis Le Grand Bleu presque. Regardez, un dauphin, une baleine à bosse, un requin-mammouth. Et c’est fini ; on peut relâcher Eric Serra.
Comme je le disais, Moby n’est pas con. Il sent, il flaire, il s’inspire. Hotel n’a pas la trempe d’un Play, mais il est déjà mieux que 18, et il devrait être amené à avoir du succès à la condition évidente que Moby vende bien ses morceaux, et ne les laisse pas tourner uniquement sur radio. Parce qu’il suffit d’une publicité efficace à la tv et pan, l’influence sur les ventes de l’album vont s’en trouver touchées. Toute la première moitié de l’album tient parfaitement la route sur les ondes. Ensuite, ça se complique un peu ; il y a eu de la fuite de talent.
Hotel n’est pas un album électro. Moby, c’est un nom, quoi qu’on en dise/pense. Si des gens entendent un morceau qui leur plaît, qu’ils se renseignent et qu’on leur dit que c’est Moby, c’est l’équation gagnante. Voilà comment je vois la chose.
3 / 5