Groupe un peu atypique dans l’univers du pop-rock briton actuel car n’ayant pas réellement des gueules pour poser sur scène, les petits malins des Rakes menés de main de maître par le brillant Alan Donohoe, reviennent sur le devant de la scène avec un second opus : Ten New Messages. L’exercice périlleux du second album est un excellent révélateur de talents réels/bidons, et souvent à trop vouloir changer une recette une fois gagnante, les CD finissent en cale-chaise ou en repousse-oiseau dans les arbres de la mémé…Et pourtant, les Rakes ont essayé.
Si Franz Ferdinand, semble avoir réussi avec brio ce périlleux exercice avec leur « you could have it so much better » en fin 2005, le « weekend in the city » de Bloc Party divise plus qu’il n’a rassemblé les foules sur le dance floor avec « Silent alarm ». Kasabian font moins parler d’eux avec leur pourtant excellent « Empire » que lorsqu’ils étaient sortis de nulle part avec leur premier album éponyme.
Pour se rapprocher des Rakes dont l’album est ici passé au crible (si si), on peut citer les Maxïmo Park ou surtout les Kaiser Chiefs dont la récente sortie de « yours truly, angry mob », sans rien changer ou presque de leur recette à succès qui fit de « Employment » un condensé d’hymnes à gueuler une choppe à la main, semble être un succès. Ou encore les Futureheads, qui eux se sont à l’inverse vraiment plantés dans le décor avec un triste « news and tribute ».
L’arrivée des Rakes sur cette scène pop-rock européenne, se fit par l’intermédiaire de titres rugueux, vifs, teigneux (T-bone, retreat, strasbourg, 22 grand job), mais également avec des morceaux plus posés qui tout en gardant une énergie certaine démontraient un sens de la mélodie assez fin (animals, binary love, work work work…). En France, deux choses les firent connaitre au grand public (ou du moins les firent entrer dans « l’inconscient collectif ») : une publicité pour Canal Sat largement diffusée sur les écrans français ayant pour bande son « open book », mais également la participation plutôt réussie à un album hommage à Serge Gainsbourg (avec entre autre Franz ferdinand, Placebo,…) « Monsieur Gainsbourg revisited », à travers une reprise anglicisée du poinçonneur des Lilas nommée « Just A Man With a Job ».
Ce dernier aurait d’ailleurs bien plus sa place dans le récent « ten new messages », que dans leur précédent opus plutôt tourné vers une multitude de mini titres punks de 2 minutes. En effet, une ligne directrice semble émerger de leur nouveau rejeton : des titres plus posés, plus longs, laissant la part belle à des mélodies efficaces ne s’étiolant pas après deux enchaînements couplet – refrain.
La chanson d’ouverture de « ten new messages », the world was a mess but his hair was perfect est assez symptomatique de ce radical changement : si certains titres du premier opus seraient terminés à la fin de la lecture du-dit titre, ici, les Rakes nous balancent d’entrée le plus long titre de l’album. Pendant ces 5 minutes, la bande d’Alan Donohoe nous promène le long d’un riff qu’Albert Hammond Jr ne renierait pas, soutenu par une rythmique assez légère et enjouée. N’y attendez pas un final propulsé à la TNT, il ne viendra pas. Par contre, ne soyez pas surpris de voir votre esprit assez hanté par la mélodie ici rencontrée.
Malgré une durée relativement longue par rapport à leurs anciens titres, les Rakes surprennent vraiment par un talent mélodique largement au delà de la normale, mais qui n’enlève rien à l’accessibilité et l’efficacité de ceux-ci. Au lieu de vouloir retourner quelque peu leur veste de peur d’effrayer leurs plus anciens fans, les Rakes enfoncent le clou avec « little superstitions », conçu de la même manière : à savoir un savant et simple mélange de mélodie chantée et gratouillée. Plus tard dans le disque on retrouvera ses éléments cuisinés différemment mais au même goût, comme « leave the city and come home » ou le splendide « when tome cruise cries », véritable sommet de l’album. Une place au soleil qu’il se dispute tout de même âprement avec le tubesque « dance together », au refrain imparable d’une efficacité rare, et « suspicious eyes » seule chanson « guestisée » (Laura Marlin, Phil Morais and Raxstar) de l’album.
Rare sont les disques qui même après avoir usés ma platine, ne subissent pas la règle du « forward-car-ouais-celle-d’après-est-vachement-mieux » : celui-ci en fait partie.
Après un premier album construit sur l’énergie et la vivacité, comparable à un uppercut envoyé dans l’estomac, les Rakes nous mettent KO debout, cette fois-ci sans violence aucune, juste en nous fixant dans les yeux et nous envoûtant d’un battement des cils.