Cannes 2013 – Sélection Officielle
Arnaud Desplechin est un habitué du festival de Cannes. Pour Jimmy P. il retrouve également son acteur fétiche, Mathieu Amalric, dans un contexte nouveau : son intrigue se situe aux Etats-Unis. Tandis que ses précédents films étaient torturés et tortueux, il semble apaisé. Les conflits ne fusent pas et les déclamations de face se font sans heurt. On prend le temps de se parler, de se chercher, alors même qu’il a changé ses habitudes de tournages en allant plus vite, en faisant moins de prises.
Jimmy Picard est un Indien, Blackfoot pour être précis. Il est blessé à la tête lors de la Seconde Guerre Mondiale. Depuis son retour, il est assailli de vertiges, d’hallucinations, de troubles de l’audition et de la vision. Il se rend dans un hôpital du Kansas pour passer une série de tests. On découvre que ses maux n’ont aucunes causes physiologiques. Pour l’aider à soigner son trouble psychologique, l’hôpital fait appel à Georges Devereux, un ethnologue psychanalyste, spécialiste des Amérindiens. De cette rencontre, va naître une belle relation, enrichissante pour chacun.
Avec une sérénité qui fait du bien au spectateur, Arnaud Desplechin adapte l’œuvre de Georges Devereux, elle-même inspirée de sa rencontre d’avec le vrai Jimmy. La mise en scène est posée, calme. Il aborde un sujet en accord avec le reste de sa filmographie puisque la difficulté des relations entre les gens est centrale. Jimmy a évidemment des problèmes avec les femmes, dont sa mère. Georges aussi. L’on les voit tous les deux, tantôt dans le présent, tantôt dans le passé et via des flash-back, affronter les femmes. Ils parlent de leurs rêves pour comprendre leurs failles. C’est bavard, précis et astucieux.
Pendant cette discussion qui s’étire sur plusieurs jours, voire même plusieurs semaines, on pense à The Master, pour deux raisons majeures, l’aide mutuelle que s’apporte chacun des personnages et l’immensité des acteurs en présence. Benicio del Toro intériorise à merveille. Cette rencontre révèle une certaine magie.
Je préférais Desplechin plus à cran, mais son Jimmy P. porte en lui quelque chose de rassurant. C’est la tendresse installée entre les personnages qui reste en mémoire, ni leurs difficultés, ni leurs doutes. On retient aussi la prestation de Benicio del Toro, qui part dans le peloton de tête pour le prix d’interprétation.
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