Mobile Homes

Le long-métrage MOBILE HOMES est une extension du court-métrage du même nom, datant de 2013 (même si le casting est différent). Vladimir de Fontenay approfondi alors son regard sur des personnages communément nommés « les laissés pour compte ». Un jeune couple, en marge de la société, conjugue le road trip et le désir de liberté. Le film crée l’attachement dès sa première scène, où Ali (la superbe Imogen Poots) amène son jeune garçon dans un centre social mais n’acquiert pas les soins espérés. A partir de là, la solidarité se dévoilera ailleurs : dans l’amour, dans la persévérance et dans la communauté. MOBILE HOMES n’est alors pas qu’un voyage physique, moteur d’un voyage psychologique.

Alors que le récit se prête beaucoup à l’émotion (séparation, maternité, pauvreté, etc…), le cinéaste refuse de s’aventurer dans ce chemin. Il préfère la noirceur du road trip à l’émotion. Ainsi, MOBILE HOMES n’est pas rempli d’un tas de bouleversements et de situations dramatiques. Plutôt que de chercher à casser ses personnages, à leur forcer des ruptures de ton, Vladimir de Fontenay change de ton une seule fois. Une première partie est concentrée sur l’errance ; celle d’une famille qui joue avec le risque et l’urgence pour survivre. Dans une seconde partie, le film nuance son regard pour parler de fragilité. MOBILE HOMES montre alors une mère qui passe de la survie autonome à la recherche de la protection. Vladimir de Fontenay dessine le portrait de personnages en marge, où l’individualisme et le collectif sont deux concepts pas si éloignés, se mêlant par l’idée commune de la liberté.

Il n’y a pas de place pour l’espoir, la liberté doit être trouvée dans un contexte cruel et un voyage basé sur la survie. Pour cela, Vladimir de Fontenay compose sa mise en scène avec toute la fougue et l’énergie nécessaire, que ce soit face au danger ou dans les moments les plus attachants. La mise en scène du cinéaste est plutôt dans une énergie glaçante, que dans la sauvagerie où le mouvement est perpétuel. Parce que dans MOBILE HOMES, ce sont l’intime et la continuité qui sont directement touchés. Les deux sont menacés d’être brisés par des surgissements soudains. Alors, le cinéaste propage l’énergie et la noirceur dans une mise en scène de la fragmentation. En travaillant ainsi sur le temps, l’espoir n’est qu’une illusion, car chaque fragment est un bloc supplémentaire qui pousse la mise en scène dans les retranchements des personnages. Vladimir de Fontenay, dans une volonté de vérité, fait en sorte que la caméra accompagne ses personnages dans des cadrages très souvent serrés. MOBILE HOMES alterne alors entre la réaction instantanée et l’énergie du drame infini (tel un effet romanesque).

Un univers qui se découpe en deux parties, même si une troisième pourrait être décelée. Dans la première partie, le cinéaste apporte beaucoup de mouvements et de coupes au montage. Il y a une ambiance très électrique dans cette première partie, où la question essentielle est de pousser la mise en scène jusqu’à la limite du dramatique. Dans la deuxième partie, plus calme et légèrement plus joyeuse, il est question de vivre l’instantané, et d’explorer la place de la mère et du fils dans état de reconstruction. Une fois la reconstruction terminée, les sensations resurgissent. Parce que l’intensité électrique de la première partie n’a pas complètement disparue. Le cinéaste fait alors revenir des motifs de la première partie, pour les mêler avec ceux de la deuxième. Entre démarche documentaire et construction fictive à plusieurs niveaux, MOBILE HOMES n’invente peut-être rien (et s’inspire beaucoup) mais réussit à capter l’imminence des sensations (amour, liberté, sécurité). Et pour un premier long-métrage, c’est un geste très louable.

MOBILE HOMES
Réalisation : Vladimir de Fontenay
Casting : Imogen Poots, Callum Turner, Callum Keith Rennie, Frank Oulton,
Pays : Canada, France
Durée : 1h46
Sortie française : 4 Avril 2018

3.5 / 5
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