On dira ce qu’on veut bien en dire (et paf!), la nouveauté vient d’Asie. Même Gaspar Noé y va tourner son dernier film. Force est de constater que même dans le drame du quotidien, si on veut éviter les classiques du genre, il vaut mieux se tourner vers l’Est. Poetry est de ces films là, une ode passagère à une personne ordinaire, mais évidemment tout n’est pas simple pour autant.
Poetry, c’est l’histoire d’une sexagénaire qui a bien vécu, mais veut vivre encore. Et oui, dans notre capharnaüm social contemporain, il faut s’affirmer. Et Mija a beau avoir 65 ans, elle est tout ce qu’il y a de plus vivants. De son apparence soignée à son petit travail, de son amour pour son petit fils à son envie d’apprendre, elle considère qu’il lui reste beaucoup de choses à découvrir, à faire. Seulement voilà, on lui diagnostique la maladie d’Alzheimer et son petit fils se révèle être un délinquant en puissance. Soulevant le voile d’une société aux moeurs cachés, le réalisateur Lee Chang-Dong continue son travail de sape en nous présentant ce portrait de femme, survitaminée et positive dans un environnement foncièrement mauvais (le premier quart d’heure accumule l’annonce de la maladie, le viol et suicide d’une collégienne..). La confrontation de ces deux univers annonce le fatalisme qui entoure tout le film.
On ne peut qu’adhérer à la vie de Mija, volontaire et amoureuse de la vie, bientôt dépassé par ce qui l’entoure mais ne baissant pas les bras pour autant. Il existe une vraie authenticité dans son désir de comprendre, de toucher du bout des doigts ce qui l’entoure. Même l’amour ne saurait lui être refusé, après plusieurs années d’absence. Poetry est un drame très sobre, porté par une poésie triste dont l’héroïne tente d’en comprendre les rouages. Son cheminement vers l’explication des choses (notamment le suicide de la camarade de son petit fils, la tentative de corruption des parents d’élèves, …) comporte une certaine magie, illustrant à merveille le fait qu’aujourd’hui la vie ne se termine pas à l’aube de ses soixante ans. Fataliste mais magnifique, le film comporte néanmoins certaines longueurs (plus de deux heures et quarts) qui peuvent éloigner le spectateur de ce récit au rythme lancinant, presque répétitif mais se décomposant comme une poésie à plusieurs lignes, se dirigeant inévitablement vers une fin lumineuse… On ne sait trop s’il faut être triste ou heureux en sortant. Le côté certain des choses, c’est qu’il ne faut cesser de s’émerveiller de ce qui nous entoure. Même après une vie remplie.
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