Il y a comme cela, des films tellement attendus que l’on devient fébrile lorsque la salle s’éteint et que le grand écran s’illumine tout en résonnant. Prometheus est lancé. L’intrigant projet de Ridley Scott qui aura tenu en haleine toute une communauté cinéphile qui sait ce que le 7e Art doit à la saga Alien — et à Ridley Scott, le pionnier — en matière de science-fiction horrifique.
Prometheus. C’est le nom de ce vaisseau spatial parti de Terre en 2093 pour rencontrer nos créateurs, ceux qui ont engendrés l’espèce humaine. Lieu de rendez-vous : une planète inconnue, hostile au premier abord, mais avec quelques endroits vivables. Une découverte rendue possible en observant des peintures rupestres de civilisations primitives sans aucun lien entre elles. Et donc, une expédition vers l’inconnu, mais pleine de surprises.
Ok donc nous avons : un vaisseau super équipé, une planète hostile juste comme il faut, un équipage fourni (17 personnes) et varié (soldats, ingénieurs, scientifiques…) et évidemment de la vie extra-terrestre. Ça ne vous rappelle rien ? Bien sûr que si. Prometheus marche sur les pas de l’illustre saga et il est désormais inutile de le nier. Mais comme on nous l’a également martelé, c’est aussi « autre chose ». Et c’est là que surgit tout le problème du film…
Alien Origins
Ridley Scott ne sait pas sur quel pied danser. Et cette hésitation dure tout le long du film. C’est dramatique. Alors qu’il y avait là le terrain le plus fertile à un monument de SF, Prometheus part dans toutes les directions et n’est absolument pas solide pour soutenir la grandeur de ses prétentions.
Spectaculaire c’est certain, les magnifiques images servies par le film masquent mal un déroulé chaotique de l’histoire, mêlant origines humaines, origines alien, affrontement entre espèces non-humaines (ou des aliens qui se battent entre eux si vous préférez) et dans tout cela un casting qui serait presque mieux à s’assoir à côté de nous pour regarder l’action se dérouler. D’ailleurs c’est même sûr, puisque comme dans tout bon film de survival, les personnages se font décimer les uns après les autres, sans même que l’on aie le temps de s’y attacher (et ils ne sont que 17 !). Heureusement qu’il y a Michael Fassbender (bon, c’est un robot) et Noomi Rapace en acharnée de la survie, même si l’on ne remplace par Sigourney Weaver aussi facilement.
A l’inverse, on reste dubitatif sur les rôles de Charlize Theron (dont le climax est d’un prévisible-risible) et surtout Guy Pearce, acteur de 45 ans maquillé comme un grabataire ! Ça sent les scènes coupées ou alors c’était juste dès le départ un coup de promo bien ficelé avec la fausse bande-annonce sous forme de TED Talk.
Mais passons maintenant aux aliens. Oui, aliens au pluriel. L’autre gros défaut du film : une multitude de formes de vie extra-terrestre, de la plus petite à la plus grande, sans réelle explication en profondeur de chaque. Un comble ! A trop vouloir nous servir de l’alien sous toutes ses formes, Prometheus ne nous laisse nous concentrer sur aucun. Et entre les vases qui suintent, les space-jockeys, les serpents qui rampent, l’auto-césarienne (une auto-césarienne !) c’est sympa mais cela nous laisse beaucoup de petites espèces orphelines d’une réelle étude qui nous aiderait à mieux les connaître, pour mieux les détester.
Alors c’est un oui pour toutes les références à Alien disséminées sur l’ensemble du film, et l’on aurait tellement voulu que ce côté soit pleinement assumé. Mais c’est non justement pour cette retenue permanente, cette multitude de scènes trop éparpillées qui massacrent la cohérence du film. Prometheus est un spectaculaire faux départ qui s’annonce étalé sur plusieurs épisodes. L’horreur ; la vraie.
CRITIQUE PAR MG
Fantastique Mr Scott. Non content d’être l’un des maîtres du genre (si, si, cherchez bien : ALIEN, BLADE RUNNER…), voilà que Ridley Scott se décidait à nous resservir de la science fiction sur grand écran. Et il en rajoutait une couche, car après plus de trente ans d’angoisse, il revendiquait même pouvoir compléter sa plus belle création, ALIEN, d’un préquel. Pour autant les derniers mois auront été habilement manœuvrés par un marketing ciselé, ne nous livrant que peu les clés de son dernier long, PROMETHEUS. La réponse est au final aussi vaste que la question, car si PROMETHEUS marque bel et bien sa filiation avec le film de 1979, Ridley Scott en profite pour creuser le sillon de son empreinte dans le genre. Loin devant les dernières tentatives du genre, il nous ressert sans commune mesure un vrai bon film de science fiction.
PROMETHEUS débute avec une découverte en Ecosse, pour mieux se catapulter en plein espace (là où personne ne vous entend crier). Nous voilà avec la première expédition terrienne dans le grand vide intersidéral. Nous sommes en 2093 et nos amis humains cherchent la vérité sur nos créateurs. Non, pas Dieu et sa barbe assis sur un trône dans les nuages, mais sur des extraterrestres qui nous auraient visités voici quelques dizaines de milliers d’années et auraient contribué à notre développement. Des anges gardiens en somme, ou de grands Ingénieurs qui feraient mumuse avec des planètes entières. Arrivés sur la planète visée, notre petit groupe d’explorateurs se la rejouent ALIEN version mécha, avec certes toutes les invraisemblances du genre (que l’on pensait dépassées, du genre « tiens, si j’allais me promener seul dans ce grand tunnel sombre » ou autre « faut pas toucher mais je le fais quand même, aïe ça pique ») mais qui font avancer le récit. Non honteux de vouloir remettre au pied du mur la science fiction, PROMETHEUS n’est pas si éloigné d’une nouvelle tel que les écrivaient Ray Bradbury ou Arthur C. Clarke, avec une histoire ramassée (un groupe d’explorateurs batifole sur une planète qu’il découvre) dont les limites deviennent leur nouveau terrain de jeu.
De cette manière, Scott parvient à nous servir un film totalement nouveau, parfaitement maîtrisé sur la forme (même la 3D est pour cette fois séduisante, mais pas forcément encore totalement utile). Si on peut y voir quelques lacunes scénaristiques (des trous dans l’histoire qui déconcertent un peu), l’ensemble est d’une puissance rarement vue. Outre un casting hallucinant (celui d’ALIEN était pas mal non plus, il faut le concéder), composé de Noomi Rapace, Charlize Theron, Idris Elba, Michael Fassbender et consorts, PROMETHEUS est un film aux grandes finitions, un hommage au genre et à ses influences. Si Giger est évidemment omniprésent dans les décors et les créatures (sans vous révéler pourquoi, mais elles sont ici multiples, avec délice), on pense énormément, et avec ironie, à Jean Giraud a.k.a. Moebius, disparu quelques semaines auparavant. L’ampleur de l’histoire sur le fond (les grands principes, les idées « religion versus science », une des marottes du co-scénariste Damon Lindelof) et la minutie des scènes nous imposent ici un nouveau grand film de science fiction, qui partagera forcément.
Loin d’être universel, PROMETHEUS ne peut faire l’unanimité. Forgé à l’ancienne, explorant des idées et une conscience humaine encore frêle à l’image de l’univers (voir les yeux ébahis du personnage de Michael Fassbender, ou juste l’inconscience d’une expédition qui ignore où elle met les pieds), PROMETHEUS se veut unique et insoluble. Nul autre qu’un grand réalisateur aurait pu mettre cela en images, et parmi les quelques postulants Ridley Scott excelle. Pour tous, il restera tout de même de grands paysages, des visuels hallucinants et non sans second degré la conception d’une des créatures les plus connues du bestiaire cinématographique, ALIEN.
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