Un monde sans femmes

Le village où le film a été tourné se nomme Ault. Nous sommes donc sur la côte picarde. Guillaume Brac nous amène donc dans cette partie de la France où tout paraît chaleureux. En passant de Madame Picard, l’amie de Sylvain qui le trouve intéressant, le patron du bar Bouboule, le vendeur sur le marché, etc. Ce qu’on retiendra surtout dans ce film, ce sont donc les fabuleux paysages de la côte picarde. Et quand on regarde bien l’enchaînement des situations, Guillaume Brac (passé par la FEMIS) nous offre une véritable cartographie du village. Une cartographie où la beauté est de rigueur, où c’est le lieu qui amène la scène. Comme la scène du marché, où Sylvain hésite entre deux polos, et cela l’amène à se confronter à l’avis des deux personnages féminins du film.

Et c’est aussi ça qu’il y a dans le film : un grand coeur. Un coeur gros comme un océan. Les femmes sont drôles et joyeuses, les hommes se sentent seuls dans leur vie (une vie et un monde sans femmes). L’arrivée d’une mère aussi belle et joyeuse que sa fille adolescente va changer la donne durant un certains temps. Mais ce qui va avant tout créer le charme de l’histoire et des relations, c’est la personnalité de chacun. Le policier qui ne cherche qu’à séduire la mère, Sylvain timide et seul (n’ayant pas confiance en lui), une mère immature et une adolescente très mature.

On dit que pendant les vacances ont fait des rencontres superbes, les vacances c’est le temps de l’amour. C’est le récit de ce film au fond : Sylvain (Vincent Macaigne) est seul avec ses crevettes et ses fraises mais il finira par être heureux en compagnie de personnes féminines. La rencontre paraissant improbable entre un solitaire, qui ne sera pas Mister Monde, et deux séduisantes personnes. C’est la vie de tous les jours. C’est là qu’on retrouve ce que l’on aime dans la Nouvelle Vague : on filme en décors réels, on filme dehors pour y montrer le vrai et le beau.

Ce film s’inscrit définitivement dans le genre des romances tragiquo-comique. Dans ce monde de brutes, il y a quand même des personnes simples, qui sont heureux grâce à de petites choses. Pas besoin de la ville et de ses activités multiples pour connaître la joie. La pêche à la crevette et l’ambiance chaleureuse de voisins de campagne suffisent au quotidien à donner le sourire aux lèvres. Essayez de trouver un vendeur dans un marché qui vous offre le 3e polo pour 2 achetés dans une grande ville. Ce fait est réel dans la côté picarde.

Ce film parle donc d’amour. Comme le dit le synopsis un peu plus haut, il est question de cette vie de solitaire qui fera une pause pour prendre du bon temps et reprendre goût à l’amour et la passion. Mais surtout, on voit encore une fois (après Le Naufragé, court-métrage inclus dans le DVD du film) que Guillaume Brac aime ses personnages. Il ne laisse aucun personnage de côté, leur accordant à tous une importance dans le récit. En parlant des personnages, on se voit obligé de remarquer la grande performance de Vincent Macaigne (qui figure aussi dans Le Naufragé). Avec les autres membres du casting, il arrive à toucher le spectateur grâce aux vagues de tendresse qui s’immiscent entre les personnages.

Mais aussi, c’est un film qui exploite avec talent l’anecdote pour créer un récit à la fois profond et familier. En quelque sorte, ce film s’inscrit dans une longue lignée de marivaudage français. Ici, plutôt un marivaudage moderne où la direction d’acteurs est rare, la photographie est magnifique, la musique est douce et la mise en scène à la fois attentive et exquise. Une mise en scène qui nous livre notamment quelques petits jeux amusants : le jeu des couleurs par exemple. Et une mise en scène qui tire son influence de Rohmer (en autre) dans la manière.

Finalement, Un Monde Sans Femmes est un film qui joue entre la tragédie romantique et la comédie pour toucher le spectateur sur tous ces fronts. Guillaume Brac signe pour ses débuts une oeuvre rafraichissante, qui devrait servir de leçon à ses cousines américaines. Avec le court-métrage Le Naufragé (dans le même esprit, pas besoin d’en refaire une critique pour redire la même chose), ce film nous donne envie d’un long-métrage pour retrouver Vincent Macaigne et sa côte picarde. Comme quoi, 1h suffit à faire du grand Cinéma.

4.5 / 5
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