Mulberry Violence, la mue réussie de Youth Lagoon en Trevor Powers

À Onlike, on a déjà beaucoup écrit sur Trevor Powers. Sans pour autant l’appeler ainsi. Il était — et il sera à jamais — Youth Lagoon, pour une trilogie d’albums aussi réussis qu’intemporels.

On a donc découvert l’artiste en 2011 avec un premier disque sorti de nulle part, The Year of Hibernation. À sa voix juvénile fantomatique s’ajoutaient des mélodies aussi délicates que mélancoliques, produisant une oeuvre comme il n’en sort que tous les cinq ans. Telle une comète.

Trevor Powers, époque Youth Lagoon

On ne savait pas à l’époque, tout le processus de construction dans lequel Trevor Powers était impliqué. Son album était un journal intime (il l’avait déclaré) mais on ignorait qu’il y avait derrière toute une construction d’identité. Sept ans plus tard, et deux albums supplémentaires (Wondrous Bughouse et Savage Hills Ballroom) Trevor Powers est devenu Trevor Powers.

Trevor Powers, aka Trevor Powers

Dire que son style s’est affirmé serait un euphémisme. Mais cette construction musicale s’avère passionnante à observer, à écouter. Bien loin d’une rupture : une élaboration. Minutieuse, méthodique, comme les tatouages qui viennent se rajouter au fur et à mesure sur son corps, Trevor Powers a repris de sa trilogie initiale les éléments qu’il a dilués dans sa nouvelle création.

Les petits sons « grotesques et envoûtants » qu’il a travaillés pendant deux ans après la fin du projet Youth Lagoon, ont servi de base à l’élaboration de Mulberry Violence. On y retrouve évidemment la douceur de sa voix — avec des exceptions notables, à l’instar de Film It All — mais une plus grande dureté des sonorités, moins atmosphériques. Des rythmes également, comme celui de Clad In Skin, morceau à l’ambiance jazzy déstructurée, des plus efficaces.

On retrouve aussi ses expérimentations, sombres, tourmentées voire torturées (Squelch). Comme un miroir de sa propre personnalité et de l’image que l’artiste continue de diffuser.

Artiste californien né en 1989, avec une expérience musicale équivalent au double ou au triple de son âge, Trevor Powers signe donc un « premier » album qui est loin d’en être un, tant la richesse de son univers lui permet une palette d’une rare intensité. C’est beau.

4.1 / 5