Réalisé par Georg Maas. Écrit par Georg Maas, Judith Kaufmann. Avec Juliane Kohler, Liv Ullmann, Sven Nordin, Julia Bache-Wiig, Rainer Bock, Ken Duken. Durée 97 minutes. Allemagne, Norvège. Sortie française le 7 Mai 2014.
<< 1990, le mur de Berlin est tombé. Katrine a grandi en RDA, et vit en Norvège depuis 20 ans. Elle est le fruit d’une relation entre une norvégienne et un soldat allemand pendant la Seconde Guerre Mondiale. A sa naissance, elle a été placée dans un orphelinat réservé aux enfants aryens. Elle parvient à s’échapper de la RDA des années plus tard, pour rejoindre sa mère. Mais, quand un avocat lui demande de témoigner dans un procès contre l’Etat norvégien au nom de ces «enfants de la honte», curieusement elle refuse.>>
Présenter un pan de l’Histoire au Cinéma est toujours une affaire compliquée. C’est pour cela que la plupart des auteurs préfèrent ne pas le généraliser. De peur d’être trop concis, ou même que le film en serait trop long. Pour cela, ces auteurs prennent le choix de l’utiliser comme pied d’estale. Comme la fondation de base d’une histoire plus intimiste, plus personnelle pour les personnages du récit. C’est que Georg Maas fait ici. Il prend le scandale de ces « enfants de le honte », pour centrer son intrigue autour d’un seul de ces enfants aryen. Le film va alors nous peindre le mode de vie de cet enfant aryen, avec les conséquences provoquées sur elle.
C’est en cela que l’adaptation de l’Histoire est intéressante. Le passage à l’intime est sujet à plusieurs avantages cinématographiques. L’empathie est plus facile qu’avec une succession de dix personnages (voir les séries télévisées). Le protagoniste n’est pas présenté comme une simple victime, ou un simple coupable. Mais c’est surtout une personnalité, un caractère, des attitudes, … contrôlés par le réalisateur. Cette fonction permet à Georg Maas de ne pas tomber dans le piège de l’illustratif. Et il faut dire que l’actrice Julianne Kohler amène toute son énergie et ses différentes couleurs de jeu.
Je ne vais pas me risquer de parler des événements invoqués dans le film. Il faut voir le film pour cette petite leçon d’Histoire, que certainement peu de personnes connaissent. Plusieurs éléments amènent quelques bouleversements dans le récit. Mais ceci n’empêchera pas Georg Maas d’avoir une narration pleine de facilités et de détours maniéristes. Même si le film passe rapidement à l’intimiste, la narration est très linéaire. C’est comme si Georg Maas, malgré les quelques bouleversements de son récit, n’a jamais voulu changer de ton. Le point de vue est net et précis, mais il est déjà complet dès le début. Le style narratif ne subira aucune évolution en même temps que l’ajout de quelques changements.
A cause de cela, Georg Maas n’a pas d’autre choix qu’avoir une forme très académique. Des plans à simple composition. Un minimum de paysage, d’objets décoratifs pour décrire les lieux de l’action. Mais aussi le minimum plus flagrant de mouvements de caméras. Le film est constamment dans une forme froide. Comme un certain recul, une certaine retenue sur le thème de fond. Alors que, dès le début, Georg Maas nous impose un point de vue. L’approche n’est pas contradictoire, au contraire, mais bien trop classique pour y démarquer une approche travaillée. On sent que l’approche ne changera pas malgré les quelques bouleversements de l’intrigue, et que cette intrigue est la priorité.
Cette forme, au montage invisible, ne peut jamais venir soutenir la mise en scène du cinéaste. Car il y a aussi un minimum effectué dans les attitudes. La mise en scène est bien trop enlevée pour captiver. Là où la forme froide aurait eu un effet hypnotique, la mise en scène ne le permet jamais. Cela à cause d’une hésitation constante. Avec quelques allures de film américain, ce film penche entre deux ambiances. On ne sait jamais si on doit entrer dans un polar, ou alors si on doit entrer dans un thriller intimiste. La mise en scène se veut jouer à la fois sur la psychologie des personnages. Mais également sur le suspense physique (causé par la trame de fond). Georg Maas s’embourbe inutilement dans le film d’espionnage, qui prendra vraiment de l’ampleur et sa nécessité dans le dernier quart d’heure.
Niveau ambiance, le frisson ne peut jamais se démarquer avant ce dernier quart d’heure. Avec son scénario poussif et son traitement compliqué, Georg Maas manque un peu d’ambition dans son approche. Cela se ressent notamment sur la piste sonore. Des sons d’ambiance basiques et quasiment dispensables. Mais surtout une musique plombante. Voilà absolument ce qu’il ne faut pas faire dans un film de genre (thriller ou polar, ici ça s’applique aux deux) : que la musique vienne créer l’ambiance, les sensations. Le film se complique trop dans son traitement pour réellement immerger son passage à l’intime dans l’Histoire.
2 / 5