Il faut voir ce film. Car si la convention collective sur le cinéma français existait déjà, ce film n’aurait jamais pu voir le jour. Et ça aurait été bien dommage. Seulement une poignée de films dans une année sont aussi joyeux que ce film. Et il faut en profiter. Surtout à l’approche de l’été. Même si le soleil vient à manquer à certains endroits, ce film nous prépare bien à l’été. Comme un air de vacances, où une bande de potes partent de Paris pour aller vers la mer du Sud. On quitte les déboires de la vie quotidienne pour s’amuser, roucouler et se vider l’esprit.
Mais avant d’être un film sur une bande de potes, c’est un film fait par une bande de potes. Antonin Peretjatko fait parti de ces jeunes cinéastes français en qui on peut croire. Il est de ces jeunes cinéastes sur qui on peut compter pour assurer la relève du cinéma français. Car toute la nostalgie est présente dans son film. Et on sent qu’avant d’avoir un discours, Antonin Peretjatko , son équipe et ses acteurs s’amusent comme des fous. Il suffit de voir à quel point Vincent Macaigne est déchaîné.
On l’avait vu notamment dans Un monde sans femmes (Guillaume Brac, 2012), où il jouait un rôle plus intimiste et dramatique. Ici, sa fougue et sa motivation sont à l’instar du ton du film. Comme un bonbon que l’on déguste au travail, ce film est un instant de fraicheur et de liberté quand tout va mal. Non pas le cinéma, puisque la situation du cinéma est sujette à débats. Mais par rapport à la société dans laquelle nous vivons. C’est la crise, il n’y a plus d’argent dans les caisses de l’Etat, il n’y a plus d’argent dans les poches des citoyens. A l’image de la première scène, Antonin Peretjatko se moque de la politique et de la société actuelle. Où tout est absurde.
Et il décide de donner ce ton, cette ambiance à son film. Comme avec No de Pablo Larrain, ne soyons pas trop sérieux. Mettons une touche de burlesque (bien qu’ici c’est plus appuyé et plus gros que dans le film de Pablo Larrain). Le film vous rire (ou sourire) toutes les cinq minutes. Tout est sujet à l’humour désopilant. Aucune peur, prise de risque, la vie est absurde et on le dit. Tout comme l’excellent Esteban, qui en arrière plan, coince son sac sur un poteau. Ou quand il s’agit des résultats scolaires. Mais au travers des plaisanteries à gogo sur la société, Antonin Peretjatko n’en oublie pas un grand ingrédient.
Je le répète une énième fois, mais l’amour est le plus grand sujet au Cinéma. Et quand il s’agit de l’été, pourquoi pas parler des amours de l’été. Il est donc question de retrouver la personne pour qui on a eu le coup de foudre. Que c’est beau. Mais cette histoire d’amour est envelopée dans une tâche. Le burlesque prend trop de place pour que l’histoire d’amour soit sublime. Ici, l’amour entre Hector et Truquette devient un prétexte au film. Encore pire, elle devient un prétexte à chaque scène.
Tout simplement parce que le film a une narration sous forme de sketchs. Chaque scène a un nouvel objectif. Et tous ces petits objectifs rassemblés forment l’enjeu général : retrouver l’autre personne que l’on aime. C’est vraiment le point noir du film. A force de vouloir faire rire son spectateur pour ne pas le perdre, Antonin Peretjatko déstabilise sa mécanique narrative. Le rythme en prendra quelques coups, mais le film arrivera toujours à repartir sur ses pattes. Même si les scènes explicatives (rêves et flashbacks) sont assez lourdes (mais néanmoins sympathiques).
Tout ce fond est contenu dans une forme qui saute aux yeux. L’influence de la Nouvelle Vague se fait ressentir dans (pratiquement) chaque plan. Il faut notamment noter le jeu d’acteur bien théâtralisé. Mais les acteurs ne perdent pas leur performance, et restent agréables à suivre dans leur énergie communicative. Mais surtout, on dirait que ce film est sorti des cartons poussiéreux des années soixante. Ce film est un vrai miroir de la société, filmé dans le réel. Toujours cette idée d’intégrer les acteurs dans le décor extérieur. Bien que ce film peut paraître comme le projet d’amis bobos parisiens.
La folie de la ville se transmet dans les personnages, comme une sorte de modèle de la jeunesse. A relever l’évocation de Mai 68. Un road movie exaltant, filmé en pellicule, où chaque photographie est une éclaircie dans la crise évoquée plus-haut. Comme pour les vêtements portés par les acteurs. La robe à pois de Truquette, le chapeau de paille de Charlotte, le short de Bertier, la chemise de Pator : les images sont comme le fond, ça annonce l’été alors que la météo est grise.
Finalement, La Fille du 14 Juillet est un film sur le mal-être de la société. Un pays en crise, plus d’argent dans les caisses ni les poches. Ce film porte un regard absurde sur la société. Avec un vent de burlesque et de nostalgie, le film est d’un humour où comprend parfaitement l’énergie du film fait entre potes. Des potes qui réalisent un film qu’on dirait sorti tout droit des tiroirs de la Nouvelle Vague. Antonin Peretjatko nous offre un film au fond moderne, sur un ton absurde, avec la forme du passé. Réjouissant en ces temps gris.
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