Pas moins de trois critiques, garanties sans spoilers.
Version courte (Kynerion)
La Ligue des Gentlemen Extraordinaires : bien aimé. En général quand il y a un petit côté extraordinaire dans un film, ça marche. Là, c’est toute une bande de gentils comme de méchants qui sont extras, alors…
Des personnages assez bien utilisés dans l’ensemble : le charisme de Sean Connery (tout le monde est unanime là-dessus), le très bon Jekyll/Hyde qui l’un des caractères les plus soignés, l’homme invisible Griffin Skinner et l’immortel Dorian Gray trop peu exploités compte tenu de leur pouvoir, le capitaine Nemo mono-expressif et surtout à la voix ridicule mille et une fois entendue sur les ondes et à la tv (c’est la voix du tigre de Frosties, entre autres…), Tom Sawyer dont on se passerait bien finalement, et la jolie vampiresse Mina, au côté démoniaque très marqué et réussi.
Un film inventif (j’aime ça aussi), mais une fin qui n’est pas à la hauteur, dommage.
Version longue (Mg)
Encore une adaptation de comics ! Et oui, mais on commence à y prendre goût, et ça n’est pas prêt de se terminer…
Ici on a affaire à un revival gigantesque des héros de la Littérature classique du XIXe, et cela grâce aux talents de Mr Alan Moore, auteur culte. Il réunit pour des aventures grandioses des emblêmes tel qu’Alan Quatermain, Doryan Gray, Myster Jekyll, l’Homme Invisible, Tom Saywer, le capitaine Nemo, et une ex à Dracula. Autant dire que le passionné de tous ces auteurs va halluciner, et en même temps prendre plaisir à les suivre dans leur lutte contre le machiavélique Fantôme !! Qui ne veut rien de moins que provoquer une guerre totale et s’enrichir… On retrouve là les bassesses des grands méchants des ces anciens temps, ou même des James Bond.
Certes le film propose un voyage total dans une fin de XIXe (1899) quelque peu modifiée, mais de plus le réalisateur (déjà auteur de Blade, encore une adaptation de comics plutot réussie) sait y faire, et nous propose quelques paysages et inventions surprenantes. Attention ! Plongez totalement dans cet univers ou craignez de vous y perdre ! en effet, difficile de rester plausible quand le Nautilus accoste à Venise, ou que Nemo circule en voiture. Un certain second degré est indispensable…
Pour le reste, les personnages sont plutôt réussis, chacun ayant sa propre histoire, pour la plupart associée à leur don prodigieux. A noter l’Homme Invisible très peu utilisé mais intéressant, et un capitaine Nemo bondissant. Mais d’autres tels Jekyll ou Gray sont également passionnants. Seuls Mina et Saywer restent sur le carreau.
Le seul regret vient du rythme du film, qui se compose de trois parties. Dans la première on découvre les personnages dans des scènes d’expositions un peu lentes, sauf celle de Quatermain dès le début. Dans une deuxième, l’équipe se lance à Venise, pour une grosse scène de baston sympathique, mais rebondit sur une fin bancale. Certes bien menée, mais ponctuée de lenteurs. On regretterera qu’un deuxième film ne soit pour l’instant pas envisagé (box office moyen, remboursement difficile), car tel X-Men, ils auraient pu décoller…
Bref, un bon moment, descendu par certains critiques, mais agréable dans sa forme comme dans son fond pour quiconque se rappelle ses lectures classiques de jeunesse… et ses comics !!
Version bonus (Absalom)
On en a entendu de belles sur ce film, des pas très positives dans la majorité hélas. Autant vous le dire tout de suite, j’allais dans la salle obscure presque à reculons, de peur d’être déçu d’un film basé sur un comic-book éponyme… Il n’en sera rien, je vous le dis également d’entrée de jeu !
Angleterre, Allemagne, deux grandes puissances de l’époque (19ème siècle) se font attaquer par un même groupe terroriste, mené par un dénommé « Fantôme », personnage terrifiant muni d’un masque qui cache un visage manifestement défiguré, un seul oeil, baigné de folie, perçant à jour cette carapace métallique.
Afrique, un envoyé du Service Secret de sa Majesté vient recruter un vieu briscard, Allan Quatermain (Sean Connery), aventurier et ex-agent de ladite majesté. Pourparlers négatifs qui changeront bien vite d’avis après une embardée pétaradante et explosive dans ce qui servait de repaire au vieux tigre. Quatermain est recruté donc pour sauver le monde, du moins presque, au moins une conférence mondiale qui aura lieu à Venise, menacée par le Fantôme justement. Pour cela, il sera accompagné d’un groupe d’agents extraordinaires, la Ligue. M, patron d’un certain « James » lui annonce et présente donc ses camarades : le Capitaine Nemo et son Nautilus (Naseeruddin Shah), Rodney Skinner (Homme Invisible, joué par Tony Curran) et Mina Harker (Peta Wilson). Ils vont devoir engager deux autres membres aux dons surprenants également pour compléter leur mission. Le premier sera un dandy du nom de Dorian Gray (Stuart Townsend), être immortel et orgueilleux, et accessoirement ancien amant de Mina. Dans son domicile ils engageront un jeune homme non prévu sur la liste, Tom Sawyer (Shane West), des services américains, venu leur prêter main forte dans cette lutte qui va s’annoncer terrible face à un ennemi qui les suit déjà de trop près. Le dernier membre sera un certain Mister Hyde, alter-ego démesuré et incontrôlable (ou presque) d’un timide Dr Jekyll (Jason Flemyng). La Ligue est au complet, direction Venise et l’action, qui ne s’arrêtera plus jusqu’au bout.
Aventures littéraires et surprenantes dans un monde steampunk tout de gris vêtu. Stephen Norrington sait mener sa barque, suivant son Blade précédent dans le monde du comic-book, il enchaîne avec une vision à la fois sombre et éclairée (au sens figuré) d’une histoire inimaginable et entraînante comme pas deux. Le jeune réalisateur décide tout d’abord de tourner son film en demi-teintes, ne plaçant des touches de couleurs que par endroits succincts et stratégiques. Ainsi seul le Nautilus, véritable refuge pour la Ligue, apparaîtra en blanc immaculé, le blanc semblant être d’ailleurs le seul élément de « couleur » du film avec les gris et le noir. Ambiance sombre pour une histoire bourrée de personnages pourtant haut en couleurs, chacun ayant sa part du gâteau à l’écran, son histoire à raconter et ses talents à montrer. Petit coup de force, les présentations des personnages servent immédiatement le contenu de l’aventure, évitant une introduction longue et intule. Les clins d’oeils à la littérature sont omniprésents, de Jack l’Eventreur à Dracula, morceaux choisis du réalisateur, tant audibles que visuels, les designs du film prenant racine dans les contes et aventures écrites de nombreux romans, basés déjà sur la recherche que Moore avait fait pour son comic-book. Un travail remarquable et complètement jouissif, voir des personnages que l’on connaît de différents cultures et histoires se rejoindre ici, là, en même temps, s’aidant ou se chamaillant pour un but précis, commun.
Le pari n’était pas facile mais le résultat est pourtant bien là, le film marche ! la mayonnaise prend tout de suite, on rentre facilement dans ce monde presque magique pour ne plus vouloir en ressortir, se surprenant de voir nos héros fétiches s’animer à travers des acteurs qui y croient, tous emplis d’un charisme à la taille de leurs egos respectifs, véritable alchimie, même le vieux Sean Connery ne dévore pas sa part du lion. Oui il guide la Ligue, mais chacun y met du sien, tous ces personnages, tous aussi puissants qu’ils peuvent être restent avant tout humains, leurs faiblesses ressortent petit-à-petit, le désarroi de Quatermain sur la mort d’un proche, la peur indicible de Gray sur lui-même, le doute sur son existence mentale de Jekill, etc. La part d’ombre tombe au fur et à mesure, chacun se révèle. Le final arrive à grands pas, duperie énorme sur leur assemblée, trahison, naissance d’un héros, surprises, tout y sera, Norrington n’a lésiné sur rien pour les spectateurs en quête de fun et d’aventure. Dans un cinéma qui se veut de plus en plus cynique, la Ligue s’offre une part de fraîcheur, renouant avec les films d’aventures passés assurément, en y injectant le talent des SFX d’aujourd’hui. On se prend à rêver d’une suite, évidemment, et le clin d’oeil final ne peut que nous le présager, pourtant l’avis financier n’en montrera rien aux dernières nouvelles hélas… on reprendra alors nos vieux bouquins de littérature anglo-saxonne, et l’on recommencera à imaginer la rencontre, hypothétique, d’un Sherlock Holmes et d’un Frankenstein.
3.5 / 5