Le rock n roll est mort
Il y a un élément de fait qui ruine tragiquement NEW YORK MELODY : le fait que le spectateur ai dépassé l’âge de la puberté. Soit en occident entre 11 et 13 ans en moyenne. Cependant, malgré une baisse significative de son taux d’hormones, l’adulescent peut aspirer à des plaisirs simples. En effet, rien ne l’empêche d’avoir très envie et de prendre plaisir à manger un Mister Freeze. A titre personnel, je pense qu’aucune nourriture terrestre n’égale le Mister Freeze en terme de satisfaction des sens : c’est fluo, tout givré sous les doigts et délicieusement chimique. Le Mister Freeze, c’est un peu le boss de fin de niveau des sucreries régressives.
De ces observations, nous pouvons décréter que non, New York Melody n’est pas un Mister Freeze. NEW YORK MELODY est un granita tout pourri que tu achètes sur la plage. C’est globalement assez joli mais pas si bon que ça, et tu ne sais pas bien si c’est à boire ou à manger. Là où on attendait un rafraichissement estival, certes un peu culcul, mais tellement sympa avec la clim’, le film se prend les pieds dans le câble jack et enchaine plusieurs faux pas assez malheureux.
Tout d’abord, le métrage se vautre dans des clichés poisseux et éculés de mauvaises comédies romantiques. Et pourtant, les studios nous ont fait espérer la nouvelle aire de la Rom-Com. Quand on croyait à un vent de fraicheur avec Emma Stone qui balance des vannes graveleuses dans CRAZY, STUPID, LOVE, ici Keira Knightley fait la moue en jouant de la guitare sur des toits à Brooklyn. Soit une pub The Kooples post rupture. Quand Zooey Deschanel expose que tout cela n’a aucun sens et que le gentil ne gagne pas toujours à la fin dans (500) JOURS ENSEMBLE, Keira Knightley devine l’infidélité de son mec rien qu’en écoutant sa dernière chanson. Et après tu t’étonnes des quelques blocages relationnels au rayon romance pour tout spectateur un peu trop nourri à ce genre de produit. Tout ça alors qu’il y a Judd Apatow à la production. Soit le mec qui chapote une large partie du renouveau de l’entertainment US. Comment le producteur de GIRLS peut-il être impliqué dans un film aussi conventionnellement barbant ? Au-delà d’être salement prévisible et donc un poil ennuyeux (ce qui n’est pas si grave, convenons-en), On regarde donc les protagonistes adopter une incroyable parade de modes comportementaux qui inquiéteraient l’ensemble de la psychanalyse moderne. Genre suivre un semi clodo pour aller boire des coups. Genre tenter de faire d’éducation de la fille de son « boss ». Genre ne pas dire à Keira Knightley qu’il est grand temps de manger un burger. Avec des frites.
Mais surtout, le film semble pourrir ce qu’il défend, avec un cynisme digne du pire hipster de Williamsburg. Le réalisateur John Carney est avant tout un musicien. Il inclut d’ailleurs CeeLo Green, Mos Def et Adam Levine à son équipe. Et les chansons sont le principal vecteur de communication entre les personnages. La musique et le rapport du musicien à son art, lorsqu’il s’y confronte ou s’en éloigne, sont les thèmes centraux du film. Comment alors faire dire à une parodie absolue de musicienne de conservatoire qu’elle accepterait de tout jouer, « as long as it’s not fucking vivaldi » ? Alors, déjà, écoute petite grue, si tes copains de Coldplay remplissent des stades avec leur soupe, c’est uniquement parce qu’Antonio fucking Vivaldi a tout inventé avant eux. Merde. Ensuite, comment peut-on ainsi dénigrer son sujet (LA MUSIQUE, LES MUSICIENS) en prônant de délaisser l’académisme au profit du conventionnel, parce que « les compositeurs classiques, c’est chiant » ? Pourquoi bâcler à ce point la syncro image-score sur les scènes musicales ? Pourquoi faire que le personnage principal soit la seule actrice à chanter dans le film qui ne soit pas musicien professionnel ?
Et tout cela est bien dommage, parce le casting est fort joli à regarder, que la BO est charmante (mention spéciale à la pépite « Lost Stars ») et la DA parfaitement calibrée pour montrer au spectateur un Brooklyn bobo-bio ravissant. S’ajoute que ONCE, précédent opus du réalisateur était une merveille de délicatesse et de poésie, ce qui rend encore plus surprenant le poids de l’échec de celui-ci.
Bilan : peut être conviendrait-il de se limiter à l’écoute répétée de la bande originale…
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