Jake Gyllenhaal sait choisir ses films, et son parcours est désormais bien rempli de rôles variés, atypiques, où il s’en sort sans encombres. Avec Source Code il tente le film d’anticipation dans un domaine largement exploité (les voyages temporels) mais là encore réussit à tirer son épingle du jeu en incarnant Colter Stevens, un soldat qui se réveille dans le corps d’un autre homme pour revivre les dernières huit minutes d’un train avant qu’il n’explose dans un attentat terroriste.
Et ces huit minutes, Colter va vraiment les revivre. Plein de fois. Jusqu’à les connaître par coeur, jusqu’à ce qu’il découvre les autres passagers qui l’accompagnent, qu’il enquête sur eux et finisse par trouver la vérité. Mais parce que rien n’est simple avec la courbe temporelle, Source Code doit réussir à concilier passé, présent et futur (car le présent est toujours le futur du passé, hein) pour offrir un dénouement acceptable. En l’occurrence : si je sauve toutes les victimes d’un attentat passé, que deviennent-elles dans le présent alors qu’elles étaient mortes ? On évitera le trop simple « et hop, finalement ils ne sont jamais morts et ils réapparaissent dans le quotidien comme si rien ne s’était passé » pour aboutir à une fin bien plus convenable. Source Code est en ce sens une bonne suprise.
CRITIQUE DE MG
Duncan Jones. Un réalisateur qui a su marquer les esprits en un film, ce qui reste assez rare pour le souligner. Après Moon (donc), l’auteur britannique s’embarque pour un film de studio, mais tout en y apportant sa marque. Film singulier, essai de science fiction, son Source Code trouve pleinement sa place dans sa filmographie encore réduite mais déjà détonnante.
Et il n’aura d’ailleurs aucun mal à rassembler le meilleur de sa génération pour arriver à ses fins. Avoir aujourd’hui Jake Gyllenhaal en acteur principal est une grande chance, surtout que l’acteur porte ici le film. Vétéran de guerre perdu entre conflit en Afghanistant et expérience militaire, assortie d’amnésie, son personnage se retrouve envoyé dans le temps/l’espace dans le corps d’une des victimes d’un attentat… huit minutes avant l’explosion. A charge pour lui d’utiliser cette aptitude pour retrouver le terroriste, et lui soutirer les informations d’un autre attentat à venir. On nage en pleine nouvelle de SF effectivement, pas très loin de Philip K. Dick (Minority Report, anyone?), et le film ne rate rien d’une narration ramassée sur son intrigue. Comme dans Moon, pas grand chose ne passe à côté. Habilement construit, tout autant concentré sur les personnages que sur l’intrigue, Source Code nous fait naviguer entre des aller-retours dans le train (qui explosera), la cabine (où est « connecté » Colter Stevens, le soldat), et la salle de contrôle. Pas besoin de grand chose pour raconter une histoire, et Duncan Jones ne semble pas aimer avoir beaucoup de casting, même si on passe du tout au tout par rapport au claustrophobiquement spatial Moon.
Toutefois moins prenant que Moon, justement, le deuxième long métrage de Jones convainc totalement. Le réalisateur, dont la prochaine réalisation sera Mute (si le film se fait), s’amuse visiblement autour des concepts de films, entre celui à l’acteur unique, ou celui autour d’un décor quasi unique (le train/la station). L’efficacité avant tout, et là où Tony Scott multipliait les effets pour une poursuite de train infernal, Jones joue la mise en scène quasi théâtrale sur les lieux de l’action, pour une partie plus sombre et fantastique du côté de l’expérience militaire. Découpé en deux mondes, Source Code ouvre la porte à un choix qui sera au final habilement détourné par le personnage principal. Car loin de rater sa sortie sur un sujet casse gueule, le film se clôt en beauté, offrant quelques grammes d’émotions avec finesse. Non, vraiment, le fan avéré de science fiction trouvera là de quoi se rassasier largement, pour un film qui joue habilement avec les codes du genre, sans extra-terrestres belliqueux ou matrice rebelle pour faire le spectacle.
Une vraie réussite donc, qui ne cachera quelques faiblesses dans la structure, largement rattrapées par l’intelligence de la mise en scène et le casting. Duncan Jones a un brillant avenir devant lui, reste à savoir s’il préférera les films concepts étranges et hypnotiques, ou les sirènes d’un Hollywood plus séduisant. Il vient de tester les deux avec succès, le choix est donc sien.
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