Auréolé d’une réputation avantageuse, passé par plusieurs grands festivals, le troublant TABOU se présente à nous sous la forme étriquée du film d’auteur. Long métrage portugais, le voici devant nous en noir et blanc, nous parlant mélancolie, regrets de vies passées et d’aventures coloniales. Ne vous laissez pas refroidir au premier abord, c’est plutôt un joli voyage auquel nous convie Michel Gomes, un diptyque étonnant mais d’une grande justesse.
TABOU, c’est une femme, une vie, un crocodile ou une montagne, au choix. Plongeant dans les souvenirs d’une vieille dame trépassée, son ancien amant nous raconte d’une superbe voix off leur rencontre et le drame qui décida de leurs vies. Ni plus ni moins, voilà une tragédie liant amour et secrets au cœur de l’Afrique coloniale, une histoire d’un romantisme exacerbé mais conté comme un fait divers, qui laisse sur nous l’empreinte des vieux films d’antan. Forcément, noir et blanc et décor exotique, on sentirait presque l’amertume des grands classiques. TABOU se joue aussi un peu de ça par sa forme et sa volonté de proposer une autre vision. Comédiens aphones, puisque tout est conté en voix off, ce qui est le principe mais aussi la limite de l’exercice. Heureusement Gomes s’en sort sans ridicule, et parvient même à distiller émotions et sentiments.
Avant cela, puisqu’il s’agit de la dernière heure de film, TABOU nous présente une longue introduction moderne, parlée et discutée sur l’héroïne, âgée, qui ennuie son monde. De là à y voir une manière forcée de passer au mode flashback et de bien faire comprendre qu’elle a du avoir un passé compliqué pour être aussi peu accommodante, voilà TABOU qui s’empêtre un peu trop longtemps dans cette présentation, avant de basculer en terre d’Afrique. Si ce n’est cette première partie bien trop longue, voilà un récit d’une grande beauté et une tragédie romantique très touchante.
3 / 5