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Réalisé par Pascal Bonitzer
Avec Agathe Bonitzer, Vincent Lacoste, Lambert Wilson, Isabelle Huppert, Pascal Greggory, Julia Faure, Jean-Pierre Bacri.
France
98 minutes
Sortie le 22 Juin 2016

Nora Sator, jeune trentenaire dynamique, commence sa carrière dans la haute finance. Quand elle apprend que son patron et sa femme ont fréquenté son père dans leur jeunesse, elle découvre qu’une mystérieuse rivalité les oppose encore. Ambitieuse, Nora gagne vite la confiance de ses supérieurs mais entretient des rapports compliqués avec son collègue Xavier, contrairement à sa sœur Maya qui succombe rapidement à ses charmes.

Dès le premier plan, où Agathe Bonitzer entre dans cet immeuble immense, il y a l’idée que tout le récit surpasse les personnages. Ce n’est pas tant que le récit se perd entre plusieurs intrigues, il s’agit surtout d’un chassé-croisé permanent entre ces personnages. Les décors l’imagent parfaitement, puisque tout est labyrinthique : de l’entrée du bâtiment où habite Nora, des couloirs des bureaux où elle travaille, jusqu’au logement de Lambert Wilson. L’errance psychologique des personnages se projettent dans la scénographie, car Pascal Bonitzer filme les espaces de façon à s’y perdre. Les lieux s’enchaînent comme un puzzle que l’on démonte : il y a des retours dans chacun, mais de manière aléatoire et furtive.

Ce chassé-croisé permet de déterminer, à chaque scène, la complexité des rapports entre les personnages : tout est à la fois mêlé mais surtout fragile. Les paroles sont souvent anecdotiques, car dénuées de tout impact instantané. Cependant, les attitudes est l’élément le plus tangible dans la mise en scène : passons sur les mots, il faut se concentrer sur la déstabilisation créée par le rapprochement des corps. Dès que l’un s’approche d’un autre, tentant une connexion / une évolution des relations, les comportements changent et la fragilité se sent à travers un sentiment d’être mal à l’aise (de la part des personnages).

Toutes ces intrigues mêlées font tomber les masques, le chassé-croisé pourrait même fonctionner avec des chapitres : le long-métrage possède une réelle ambiance romanesque. Il s’agit ici de la poésie des rapports entre personnages, comment une direction choisie peut faire perdre un point d’encrage précédent (la famille, les amis, le travail, l’amour, etc). Tout progresse si lentement, si paisiblement, que le film veut laisser le temps aux personnages de s’intégrer dans une situation, située elle-même dans un décor précis. Le romanesque de TOUT DE SUITE MAINTENANT est à la fois l’indécision de l’instant suivant, le doute sur le hors-champ.

Pourtant, le film de Pascal Bonitzer manque cruellement d’une esthétique propice à ce chassé-croisé, à cette fragilité ou à cette indécision. Le doute sur le hors-champ ne se crée que par le champ / contre-champ, il n’y a aucune recherche de placement plus subtil à une ambiance instantanée. Parce que même le champ / contre-champ s’applique à deux personnages qui ne se sont pas vues depuis longtemps. Et enfin, le plan moyen sert à remplir le montage, ne pouvant s’identifier à aucune émotion ou aucune attitude. Cela se remarque également avec le ton employé, trop faible et trop linéaire, alors que l’esthétique aurait pu le dynamiter dans une peinture (qui s’allierait au romanesque) mixant le fantasme et le désespoir : la scène où Agathe Bonitzer arrive dans le bureau vide de Vincent Lacoste en croyant qu’il s’agit du sien, est l’un des rares meilleurs moments du long-métrage.

3 / 5
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