Diamant Noir

Premier long-métrage pour Arthur Harari, frère remarqué de Tom (le chef opérateur de Guillaume Brac, de Justine Triet notamment) par ses précédents moyens-métrages. A noter que Tom Harari est le directeur de la photographie sur DIAMANT NOIR, comme par hasard. Affaire de famille ? Plutôt affaire d’un groupe d’amis cinéastes. Puisque Justine Triet est remerciée dans les crédits, tout comme elle remercie Arthur et Tom dans ceux de son dernier long-métrage VICTORIA (avec Virginie Efira, Septembre 2016). Laurent Sénéchal, monteur de DIAMANT NOIR, est aussi monteur de VICTORIA. Enfin, il y a Vincent Poymiro : co-scénariste sur DIAMANT NOIR, il l’était déjà sur TRISTESSE CLUB de Vincent Mariette. Affaire de génération, donc, une bien belle qui a beaucoup à offrir au cinéma français.

Arthur Harari exprime avec DIAMANT NOIR un fort goût pour les thrillers et les polars, tous deux noirs. Là où le long-métrage déraille légèrement, c’est dans ce mélange des genres. Parce que le film est à la fois une exploration du thriller et du polar, mais aussi un récit intime sur la famille. A force de pousser le doute dans la tragédie familiale, le cinéaste n’arrive pas toujours à appuyer les genres car il hésite sur la pertinence de chacun dans plusieurs situations. Cependant, le thriller et le polar se marient très bien dans cette sorte de tragédie shakespearienne, où chaque personnage suffoque à cause de sa position au sein d’intrigues diverses.

Mais le film se rattrape par la violence qui s’empare de l’être humain : comme si elle est inévitable pour souligner les troubles de cette tragédie shakespearienne. La filiation est peinte avec noirceur, avec souffrance, tandis que la rédemption est perturbée par la dualité intime. Le thriller est certainement le genre le plus puissant dans ce film, face à une dimension polar. Parce que la violence est davantage froide que soutenue, plus réservée que détonnante. C’est que le refus cruel de la vengeance amène une forme de magnétisme envers les personnages. Ils semblent hypnotisés par leur dualité intime : la violence ou la filiation.

Cette magnétisation est en réalité une forme de possession. Déjà Niels Schneider trouve un rôle qui révèle son talent, car il a beaucoup cabotiné auparavant (surtout dans la mini-série ODYSSEY) mais c’est avec Yann Gonzalez dans LES RENCONTRES D’APRES MINUIT qu’il a montré qu’il sait jouer. La possession est celle du personnage qui semble glacé par la noirceur des relations, par l’ambiguïté de la dualité intime. Possédé par la tragédie et possédé par la violence. La seule sauvagerie, que le spectateur attend, est dans l’intérieur des personnages. A l’extérieur, l’image n’est qu’une ambiance malsaine.

C’est tout l’avantage de la mise en scène de Arthur Harari, le film balaye les ambiances qu’il soumet, qu’il enclenche. C’est peut-être pour cela que les genres ne sont pas assez appuyés, justement parce que chaque ambiance installée est est stoppée net par la suffocation. Comme si, par la magnifique photographie de genre de Tom Harari, il y a un déraillement des attitudes et des ambitions des personnages. L’image dans DIAMANT NOIR, c’est l’analyse d’un instant de relations entre personnages, supprimant tout horizon possible, provoquant la noirceur de la tragédie personnelle.

DIAMANT NOIR de Arthur Harari. Avec Niels Schneider, August Diehl, Hans Peter Cloos, Guillaume Verdier, Raphaele Godin, Jos Verbist, Hafed Benotman. France, 115 minutes, 2016.

3.5 / 5