On ne le dira jamais assez, peu importe si la qualité est très bonne ou tout juste bonne, le cinéma français qui ose est rare sur nos écrans. Ce qui compte surtout, c’est l’audace et un regard différent. LES GARCONS SAUVAGES s’inscrit dans cette liste de cinéastes français-e-s qui osent. Avec des personnes comme Yann Gonzalez, Julia Ducournau, Hubert Charuel, Justine Triet, Antonin Peretjatko, etc… Comme les autres, l’audace amène une atmosphère bien marquée. Bertrand Mandica est dans le style gothique, mais pas comme un thriller ou un film horrifique. Un style gothique traversé par une imagerie surréaliste, qui donne à l’épopée un caractère mental et romanesque. Le voyage esthétique proposé se vit comme un rêve qui progresse tel un conte, tout en se concentrant sur l’instant donné, en poussant la mise en scène dans ses retranchements de pure performance.
Cela permet à Bertand Mandico de travailler le corps de ses comédien-ne-s. La transformation étant progressive (et n’étant actée concrètement que vers la fin du film), la mise en scène traite les corps sous plusieurs aspects. Il y a évidemment la sauvagerie, qui planent au-dessus de chaque séquence. Il y a également le voyage corporel, dans le sens de la frivolité vers l’initiation pour finir dans la conscience d’une anatomie. Comme si le voyage du corps équivalait au passage de l’enfant à l’adulte, avec tous les apprentissages qui vont avec. Les corps sont tout de même synonymes de liberté : Bertrand Mandico enferme rigoureusement le caractère dramatique de son récit, pour laisser l’imagerie s’exprimer dans une folie poétique. Et surtout, pour contourner le drame, LES GARCONS SAUVAGES a un ton érotique qui donne à l’atmosphère onirique toute sa définition surréaliste.
LES GARCONS SAUVAGES est un film sur les désirs, avec une imagerie qui fait penser à la projection mentale de ses personnages. Un surréalisme qui se dessine également par le cadre (aux coins arrondis) qui devient un regard empreint d’hallucinations. Le Noir & Blanc du film est utilisé pour confronter les corps à un même niveau d’épreuve, mais aussi pour traduire le ton romanesque de l’évolution des corps (et donc des personnages). Les scènes en couleurs représentent un sommet de surréalisme, où le bricolage et l’envoûtement sont mis en valeur par cette fabuleuse technique appelée Technicolor. LES GARCONS SAUVAGES est autant une pulsion surréaliste des personnages, qu’une pulsion technique d’un cinéaste. Un film à l’atmosphère brute, privilégiant l’imagerie et les corps – tel un hommage au cinéma muet –, où le cinéaste Bertrand Mandico revendique clairement l’audace et la curiosité d’un univers intime.
LES GARÇONS SAUVAGES
Réalisation : Bertrand Mandico
Casting : Pauline Lorillard, Vimala Pons, Diane Rouxel, Anaël Snoek, Mathilde Warnier, Sam Louwyck, Elina Löwensohn, Margaux Fabre
Pays : France
Durée : 1h50
Sortie française : 28 Février 2018