Ventos de Agosto

Festival du Film d’Amiens 2014

Réalisé par Gabriel Mascaro. Écrit par Rachel Ellis, Gabriel Mascaro. Avec Dandara de Morais, Geova Manoel dos Santos. 77 minutes. Brésil. Date de sortie inconnue.

Il y a dans ce film une dimension à laquelle on ne peut s’attendre, sauf si l’on connait déjà le nom du réalisateur. Venant du documentaire, l’approche du passé a laissé quelques traces dans les images tournées. Il suffit de noter les nombreux plans fixes. Les seuls instants de travellings (ou de panoramiques) viennent au contact de l’eau (à la surface comme en dessous). Gabriel Mascaro, par son approche documentariste, pose sa caméra pour capter au mieux des moments passionnants. Laisser faire les acteurs, et donc de garder un oeil discret mais fasciné sur les personnages. Les allures et les attitudes des personnages sont explorés avec une sagesse qui tient de la rigueur des plans.

Malgré l’abondance des plans fixes – qui n’est pas pour déplaire, puisqu’il s’agit d’un regard sage et discret – le cinéaste brésilien agit comme le metteur en scène de peintures. Dans lesquelles les échelles et les focales sont des plus importantes, prouvant que l’on peut encore faire des films où les personnages sont en fusion avec les espaces. A noter le peu de plans rapprochés ou gros plans, pour mieux peindre la manière dont les espaces dévorent les personnages. Comme si ces paysages constituent l’ultime personnage du film, où les comédiens viendront se mettre à nu.

Le film célèbre un vrai rapport du corps à la nature. Les personnages gèrent leurs émotions selon les actions des autres, mais surtout selon leur action dans un espace précis. On peut parler de communion avec la nature : faire l’amour sur des noix de coco, profiter de la tranquillité de la mer, se laisser porter par le son du vent, etc… Les exemples sont multiples, mais l’important à retenir est la manière dont ces espaces sont notre habitat dans lequel la vie, la mort et l’amour se marient et se traversent. Le peu de répliques est aussi un détail signifiant de cette communion entre le corps et les espaces. Comme si, dans sa mise en scène, Gabriel Mascaro ne peut dissocier les deux car il peint une réalité patiente.

On retrouve cette patience dans la contemplation qu’il met en place. Même si le film ne dépasse pas l’heure et demie, il sait être envoûtant à de multiples reprises. La délicatesse de la mise en scène de Gabriel Mascaro montre des personnages qui vivent à fond leurs moments. Tout en prenant leur temps, ils apprécient l’instant charnel dans ce partage avec la nature. On ne peut pas tellement parler de luminosité ou d’austérité des espaces. Car il s’agit de jouer sur l’ambiguïté de ces instants. Le film se met à explorer plusieurs genres, et à diluer ses codes dans la contemplation. Entre le mélodrame, le drame social, le thriller, Gabriel Mascaro les mixe afin d’en filmer les vents qui leur insufflent les plus beaux détails de narration.

Pas vraiment d’intrigue, le film ne cherche pas tellement à avoir un « début » et une « fin ». Il s’agit d’une oeuvre qui pourrait durer des heures, et qui serait aussi passionnante de vérité et de beauté qu’un Malick. Gabriel Mascaro parle des vents d’août, mais ce sont surtout les vents qui animent les corps des personnages. Afin que leurs sensations fassent l’union avec la météo du moment. La beauté de corps nus vient se confondre avec la fraicheur de fruits tout juste tombés de l’arbre. L’attente, la passion et la transmission d’un preneur de son vient se confondre avec les bruits d’ambiance autour de lui. La liste serait longue. Le film agit comme une chronique d’instants de sensations extrêmes, où la nature est la source de notre être.

4 / 5
À lire aussi ⬇️

Devenez contributeurs/rices. 👊

Rejoignez un magazine libre et respecté. Depuis 2004, Onlike recense pas moins de 46 contributeurs indépendants dans ses colonnes,

en savoir plus
NEXT ⬇️ show must go on