Le cinéma italien est reconnu pour bien de choses, et bien de genres différents. Sans citer de titre pour éviter de s’écarter, le cinéma italien a prouvé qu’il peut nous offrir de délicieuses comédies. Après avoir réalisé un premier film au style néo-réaliste, Antonio Pietrangli s’attaque au registre de la comédie. Mais il ne s’agit pas de n’importe lequel type de comédie, car LE CÉLIBATAIRE est une satire se concentrant sur la société italienne et ses transformations via les sentiments. Pour cela, Antonio Pietrangli se situe directement dans les mentalités de l’Italie d’après-guerre, où la question sentimentale devient métaphore de la société : ce qui paraît « normal » serait « dépassé ». Les moeurs et les sentiments se libèrent, et permet de contempler un rapport complexe entre les sexes.
Pour cela, Antonio Pietrangli a choisi une figure parfaite pour la satire. Alberto Sordi porte littéralement le film sur ses seules épaules, naviguant de scène en scène, en concentrant le point de vue sur le masculin. Ses attitudes nerveuses et étant toujours dans le mouvement ample, l’acteur est le pilier du film. LE CÉLIBATAIRE est écrit pour Alberto Sordi, et ça se voit. Son personnage remet, en quelque sorte, son existence d’homme libre en question constamment, notamment en jouant sur le regard et en assurant sa présence imposante parmi ses proches. Mais surtout, sa remise en question est très portée sur la parole. Très bavard, LE CÉLIBATAIRE nécessite une fine oreille pour suivre tous les mots débités par Alberto Sordi, ainsi que ses souffles et ses tics.
Sauf que, LE CÉLIBATAIRE tourne tellement autour d’Alberto Sordi, la mise en scène se résume à son acteur principal. Le reste n’est que contexte, n’est que superflu. Tout ce qui compose l’environnement du protagoniste est un décor pour le faire errer dans sa remise en question. Les personnages secondaires sont trop peu développés, et possèdent trop peu de temps d’écran pour réellement alimenter la satire que porte Alberto Sordi. Le grand problème de LE CÉLIBATAIRE, est qu’à la fois sa mise en scène puis son esthétique, sont trop concentrés sur l’attitude d’Alberto Sordi, pour faire ressortir la misère qu’il cause autour. Cependant, l’errance et le jeu exagéré d’Alberto Sordi permettent de créer une marge, assez importante entre l’absurde du protagoniste et la réalité dans laquelle il erre et qu’il refuse de s’intégrer. Voilà comment se comportent la mise en scène et l’esthétique : traduire formellement l’apparence que se donne mentalement le personnage d’Alberto Sordi, sans chercher à dessiner le portrait angoissant que représente la réalité.
LE CÉLIBATAIRE (Lo scapolo)
Réalisé par Antonio Pietrangli
Scénario de Antonio Pietrangli, Sandro Continenza, Ruggeo Maccari, Ettore Scola
Avec Alberto Sordi, Sandra Milo, Nino Manfredi, Madeleine Fischer, Lilli Panicalli, Anna Maria Pancani, Maria Asquerino, Fernando Fernan Gomez
Italie, Espagne / 1h30 / 5 Septembre 2018