Les frères Sisters, western étrange et désabusé pour Jacques Audiard

Mostra de Venise / Compétition

Audiard, prince discret du cinéma français, aurait pu tout tenter après sa Palme d’Or cannoise. Et sans être obligatoire, la trajectoire est logique : se risquer à changer de cadre, prendre des risques. Avec LES FRERES SISTERS, adapté du roman de l’américain Patrick deWitt, Jacques Audiard s’en va en Amérique.

Loin d’être le premier réalisateur français à s’exporter (encore que, le tournage a eu lieu en Europe), Audiard ne semble pas remettre en cause son procédé créatif avec ce changement d’échelle. Production franco-américaine, LES FRERES SISTERS bénéficie d’un casting masculin 5 étoiles (John C. Reilly, producteur également, Joaquin Phoenix, Jake Gyllenhaal & Riz Ahmed) et d’une patte très « auteur européen ». Estampillé western pur souche, LES FRERES SISTERS est une odyssée de deux frères qui n’hésitent pas à dégainer leurs colts entre deux prises de bec.

Déstabilisant à plus d’un titre, Audiard sait convaincre par la maîtrise absolue de son cadre, de ses lumières (merci Benoît Debie) pour offrir un film crépusculaire d’une beauté esthétique parfaite. Mais c’est au fond qu’il restitue le ton décalé du livre, absurde voir comique. Quelque chose que l’on voit peu chez le réalisateur français, naviguant ici sur un équilibre précaire. Celui d’un pur western aux accents classiques, et un film de personnages perdus, pas toujours réalistes dans leur ruée vers l’or de l’Ouest américain. Audiard s’en empare avec délectation, voir plaisir, signant ici un de ses films les plus iconoclastes.

4 / 5