Réalisé et écrit par Shin Su-won. Avec Sung June, Kim Kkob-bi, David Lee, Cho Sung-ha. Durée 110 minutes. Corée du Sud. Sortie française le 9 Avril 2014.
<< Yujin, élève de terminale promis à un avenir brillant, est retrouvé assassiné. Très rapidement, les soupçons se portent sur June, l’un de ses camarades de classe. Mais en remontant le fil des événements, c’est un univers d’ultra-compétition et de cruauté qui se fait au sein de ce lycée d’élite. Là où la réussite au Suneung, l’examen final qui conditionne l’entrée des élèves dans les meilleures universités, est une obsession. >>
On se croirait devant un nouveau BATTLE ROYALE. Ces étudiants qui sont prêts à tout envers les autres, pour grimper les échelons et parvenir à leurs fins. La soif de pouvoir est l’élément clé de ce film. Traité comme un fait social troublant, il s’agit là des sociétés secrètes explorées en profondeur. Sauf que la réalisatrice sud-coréenne Shin Su-won n’a pas opté pour la délicatesse, ni pour la psychologie de son discours. Elle a choisi de passer par la violence, par la cruauté et par l’angoisse.
Dès les premières images, on doit se prendre au jeu de ces étudiants barbares. Et même, tout au long du film, la direction d’acteurs nous laisse dans une approche forte. Entraînés à être les meilleurs (l’idée du classement souvent affiché, les classes spéciales, les cours du soir, …), les étudiants paraissent tels des robots. Leurs esprits deviennent conditionnés à la réussite. Leurs attitudes se transforment alors en mécanismes de guerre. Des comportements brutaux, des regards aiguisés, des démarches millimétrées.
La mise en scène de Shin Su-won suit le pas. Avec ses ombres, ses lumières en basse fréquence, ses couleurs sombres dans les costumes : c’est la décadence de l’intrigue qui est peinte. Plus le film avance, plus les personnages deviennent violents. La détresse de la mise en scène devient alors de plus en plus présente. Ce qui est également un défaut pour le film. Car plus le film progresse, plus la réalisatrice a l’air de se perdre dans son intrigue.
Face au discours, la violence ne fait que se dissimuler davantage. Cela se voit dans la narration, et donc au montage. Shin Su-won choisi de faire des allers-retours constants pour s’expliquer. En effet, le présent est tellement violent, que la réalisatrice veut en donner les raisons. Le pourquoi du comment, illustré narrativement au passé, par des paraboles temporelles. Sauf que, à force de retourner constamment dans le passé, la temporalité prend le pas sur le discours. En d’autres termes, la violence devient l’atout principal : on se demande jusqu’où sont prêts à aller ces personnages. Le film ne permet plus ne porter attention, comme il se devrait, sur le discours social amené.
Cette manière d’embrouiller sa former dans son montage se ressent avec la caméra. Déjà que l’idée du montage dérègle tout le discours, la forme ne l’améliore pas. Même si l’esthétique est fortement agréable à regarder, Shin Su-won ne met pas d’identité formelle. Son approche est plus que surprenante. Dans sa forme, il y a une telle retenue qui fait froid dans le dos. La succession des plans dépeint une telle froideur de point de vue, que ça casse tout le discours social. La forme enlève toute conviction dans le discours du film, et Shin Su-won doit se contenter de sa mise en scène.
Une mise en scène qui agit seule, sans l’aide du son (soit en musique de tension plombante, soit en sons d’ambiances anecdotiques) et sans l’aide de la forme (cette froideur décrit précédemment). Cette mise en scène, par sa cruauté, est la seule influence sur l’ambiance. Tout est malsain, à force de monter en niveau la violence. La dénonciation passée au travers petit à petit, le thriller basique prend alors toute son ampleur. Comme si, une fois les codes du genre assimilés, le film ne peut plus s’arrêter sur sa lancée. Tant que le grand final et la question du « pourquoi du comment » non résolus, l’ambiance malsaine doit continuer à progresser.
Bien que le film soit agréable dans son ambiance et son esthétique, la réalisatrice montre une certaine complaisance là-dedans. Le film donne souvent l’impression de ne pas vouloir aller plus loin que ce qu’il a lancé. De plus, il faut signaler toute la symbolique intégrée à son discours. Les planètes, le trou noir, la rétrogradation, etc… Comme si les sciences et toute cette violence pouvaient se conjuguer ensemble. Un pari risqué, et très mal utilisé. En effet, Shin Su-won appuie trop fort sa symbolique. Et en perd tout son sens, à chaque fois que la violence prend le pas sur le discours.
2 / 5